Une famille formidable
Avec sa gueule de flic ravagé, Pierre Lemaître a commencé à écrire des polars à l’âge de 58 ans. Le succès est fulgurant, son talent le hisse sur le podium des auteurs les plus lus. Il est traduit en 40 langues. Après quelques perles noires, en guise d’adieu au genre où il excelle, il publie son premier polar sorti des tiroirs, Le serpent majuscule, une farce si énorme que le lecteur ne peut que regretter la fin de Lemaître du polar.
Il se tourne désormais vers l’histoire, relisant le 20ème siècle à sa manière. D’abord Les Enfants du désastre, une trilogie qui s’inscrit entre les deux guerres. Le Grand monde fait partie d’une seconde trilogie qui commence avec Les Années glorieuses, une saga familiale plutôt bien ficelée. Pas moins de 768 pages en livre de poche, qui sont dévorées en quelques soirées : de Beyrouth à Paris en passant par Saïgon, la famille Pelletier joue, gagne, perd, se retrouve, profondément blessée, mais finalement assez unie. Le père, Louis, gère une savonnerie célèbre bien au-delà des frontières. Son épouse Angèle gère l’administratif et leurs quatre enfants : l’aîné Jean, bon à rien, mais passé maître dans l’art du meurtre gratuit ; François, journaliste ambitieux qui se cassera les dents sur la réalité du métier ; Etienne, homosexuel, amoureux fou d’un légionnaire parti faire la guerre en Indochine ; Hélène, adolescente capricieuse, explosive, difficile à canaliser. Et le chat Joseph, plus sage que Bouddha, le seul qui finalement s’en sortira indemne, grâce sans doute à ses neuf vies.
Le roman se déroule entre mars et octobre 1948. Chacun des personnages affronte son destin qui tient de la saga. L’exotisme est au rendez-vous, comme l’Histoire, la pourriture qui ronge les institutions, les coups de foudre, les meurtres (Lemaître n’oublie pas ses premières amours policières !), les salopards, la guerre larvée, les idéalistes. Et les réalistes, tels les parents Pelletier. Pelletier, vraiment ?
Passant d’un personnage à l’autre, d’une situation à la suivante, l’auteur déroule savamment intrigues et rebondissements, où la cruauté et les petitesses n’égalent que l’envie de vivre vite et mieux. Grandeur et décadence d’une galerie d’antihéros, ce roman picaresque est d’une telle intensité, qu’il tient en haleine dès la première page. Les chutes, totalement inattendues, sont à couper le souffle des lecteurs les plus blasés. Un pur délice. La suite arrive en librairie.
Pierre Lemaître : Les Années glorieuses, t. 1 : Le Grand monde, Livre de Poche, Paris, 2022, 768 p.
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