À peine un petit mouchoir bleu

Le courage de vivre

C’est un tout petit livre sous couverture coquille d’oeuf. Sobre, esthétique. A peine entamé, le lecteur comprend qu’il le lira d’une traite, tant l’écriture est élégante, riche, fluide.

Celle qui apparaît aujourd’hui comme la meilleure poétesse suisse francophone – même si elle est à moitié Française, mais Jurassienne d’adoption, Françoise Matthey livre un récit sous forme de pages comme autant de courts chapitres. Une femme parle, racontée par l’écrivaine. Une femme souffre, apprend l’acceptation, s’émerveille de détails : « Humble, elle ne cesse d’aborder les petits riens, le velouté d’une pêche, le drap sur son corps assiégé. »

Fragile, elle ne caresse aucune illusion, elle fait avec, « avec ou sans ». Dehors, un rouge-gorge, le bruissement des feuilles. Elle écoute avec une attention renouvelée les sons, prêtant grande attention à la vie extérieure, elle qui perd la sienne, enfermée dans une chambre.Le renoncement dégage un sentiment d’infini désarroi. Mais il serait vain de vouloir tisser une critique poétique sur une écriture aussi mature et raffinée. Il faut peut-être soi-même vieillir pour accueillir ces pages comme des claques salutaires, se répéter « je ne suis pas la seule… » Déguster ce mouchoir bleu laisse un goût de mélancolie et de reconnaissance face à la puissance des mots : notre existence est un rythme qui un jour se rompt. C’est l’histoire du vivant.

Françoise Matthey : À peine un petit mouchoir bleu, Ed. De l’Aire, 2023, 88 p.

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