libertés

victoires dérisoires

Le serpent qui mue
Ne part pas en vrille
Chaque poussin
Doit casser son œuf
Avant de s’envoler

AZ

« Le monde libre ». La formule a perdu de sa pertinence depuis l’effondrement de l’URSS ; il n’en reste pas moins que la liberté reste un des arguments de vente principaux des démocraties capitalistes.

– Allez voir ailleurs, en Chine, en Russie, au Brésil !

L’argument semble convaincant, particulièrement pour les minorités d’opinions. Pour ce qui est des minorités ethniques et sexuelles, il reste encore beaucoup à faire, mais nous sommes sur le bon chemin, nous dira-t-on.

Différents facteurs ont fait qu’il est récemment devenu moins difficile de voir à travers cet écran.

«Give me your tired, your poor, your huddled masses yearning to breathe free! », proclame la Statue de la Liberté. Avec l’incarcération massive d’enfants séparés de leurs familles à la frontière mexicaine, toute l’hypocrisie de ce généreux idéal a été révélée aux yeux du monde, tout au long de l’administration d’un Trump aux sympathies fascisantes déclarées. De la France à l’Italie, et même la Suède, la peur de l’autre est sciemment attisée.

Des libertés aussi fondamentales que le droit d’une femme de disposer de son corps ont été remises en question par la Cour Suprême des États-Unis. Une économie de libre-échange a été supplantée, en quelques années, par des monopoles qui ne tolèrent pas les syndicats, délocalisent sans la moindre considération pour les communautés locales et profitent de leur pouvoir pour dicter leurs lois sans payer d’impôts.

Face à toutes ces injustices, nous avons cependant toujours le droit de protester pacifiquement ; et cela semble rassurer la majorité : nous ne vivons pas sous une dictature !

Même s’ils leur arrivent de le faire, un Macron ne s’en prive d’ailleurs pas, les gouvernements des pays dits démocratiques évitent de se servir des armes à feu ou à gaz, pour contrôler les foules en colère. Le fait est qu’ils en ont de moins en moins besoin : ils ont d’autres armes.

Les nouvelles techniques de coercition massives sont à la fois plus subtiles et plus efficaces. Elles se focalisent de moins en moins sur nos libertés de parole et d’action, pour mieux s’en prendre à notre liberté de pensée.

À travers la publicité et les médias, nos esprits sont de plus en plus formatés sans même que nous en rendions compte. L’indépendance de la presse, c’est symptomatique, s’est considérablement rétrécie en un court laps de temps ; avec des regroupements massifs qui favorisent la dissémination d’une pensée unique, sous la coupe de magnats mégalos de type Murdoch, qui ne se soucient que de leur propre agenda.

Les injonctions publicitaires, que les nouvelles technologies permettent de cibler avec la précision d’un missile téléguidé, affectent nos choix les plus fondamentaux. Nous nous attendons à ce que celles et ceux que nous choisissons comme partenaires en amitié ou en amour correspondent à des profils insidieusement plantés dans nos esprits. Nous souhaitons à nos enfants de réussir leur vie en fonction des décrets du système économique. Nos goûts sont canalisés en tendances et en modes dont nous sommes les victimes volontaires. Même nos aspirations spirituelles sont manipulées pour générer du profit.

Liberté ? Mon œil !

Il est indispensable que nous sortions de ce rêve artificiel si nous voulons reprendre notre destin en main. Un destin qui, d’humain, en est arrivé à n’être plus que statistique. Il faut que le mirage se dissolve.

La catastrophe psychologique, sociologique, économique et écologique, est devant nous ; cessons de nous voiler la face au propre et au figuré.

À défaut d’une prise de conscience massive, le système s’écroulera de lui-même, c’est certain ; mais le coût, en souffrances et en vies, sera infiniment plus élevé que si nous nous mettons à attaquer ce système, dès maintenant, à sa base. À savoir : si nous libérons enfin notre pensée de tous ces schémas artificiels qui l’ampute de ses pouvoirs créatifs et visionnaires ; qui la réduisent à « l’acquiescence » passive.

Attention : il ne s’agit pas de rejeter la raison pour tomber dans le piège de nouveaux conformismes irrationnels tels que le conspirationnisme à toutes les sauces. Il s’agit de prendre le risque de penser par soi-même ; d’être excentriques s’il le faut comme l’ont longtemps été les grands esprits, que ce soit dans les arts, la philosophie ou les sciences.
En arriver à une société composée de gens qui pensent par eux-mêmes ; une société qui ne serait plus manipulable.

Des politiciens qui n’appartiendraient pas à des lobbys universels pourraient se pencher à nouveau sur de vrais problèmes, sans se soucier de leur notoriété médiatique. Des chercheurs qui ne se soumettraient pas à la loi de la rentabilité pourraient à nouveau mettre la science au service de la vie, sans avoir à se plier aux normes du rouleau compresseur administratif. Des artistes qui se foutraient des critères de réussite pourraient à nouveau nous donner à rêver et à méditer. Et même des gens fortunés, une fois libérés de l’obligation de faire fructifier leurs avoirs, pourraient enfin investir leurs forces dans des buts nobles tels que la philanthropie ou le mécénat sans le faire par vanité.

Et surtout : des millions de gens qui se sentent condamnés à n’être qu’ordinaires pourraient soudain jouir d’un nouveau statut, celui d’être irremplaçable ; pourraient changer de peau et entrevoir le salut d’une authentique liberté intérieure.

Du pain sur la planche de chacune et de chacun. L’appétit, on le sent dans l’air parmi les plus jeunes, est là : il est temps de nous servir de nos couteaux pour couper les liens du système.

1 commentaire

  1. La théorie a cela de bien qu’elle laisse un espoir… mais c’est de la théorie, aussi brillante-soit-elle !

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