L’ours qui sait tout

Les problèmes s’accumulent sur la montagne.

Les Edelweiss poussent de travers et les chèvres chantent la Traviatta. Les caprices de la météo, par un jour exécrable, balaient les arbres à l’aide d’une tempête mémorable. La tragédie est aux portes de la cité, inévitable, alors les boutiquiers envisagent la commande de robes de bure et de sacs de cendres.

De leur côté, les écrivains échafaudent des oraisons funèbres et les plus courageux feuillettent les journaux à la recherche d’emplois, ailleurs, dans le monde.

De ce sombre panorama, il ne manque qu’un joueur de flûte et des enfants naïfs.

Pour remonter le moral de la population, sur une intuition, un quidam propose l’organisation de la fête de la tulipe.

Applaudissements, soulagements… Soudain, désespoir.

Personne de connu ou de reconnu ne sait planter et entretenir ces fleurs, et, d’après les gens instruits, il serait inconvenant de nommer un inconnu que personne ne connaît.

Heureusement, quelqu’un connaît quelqu’un qui connaissait quelqu’un, qui lui-même connaissait quelqu’un qui connaissait un ours.

Ça tombe bien, cet ours est un expert.

Tour à tour, jongleur de foire, animal des prétoires, portant l’habit magistral et noir, il sait lire dans le marc à café, cultiver les petits pois, danser sur la musique des corneilles, accumuler des noisettes pour les écureuils, vendre des icebergs à la marine anglaise et commander militairement les autres, comme Napoléon à Austerlitz.

Quelle chance ! Ni une ni deux, on le fait venir, une occasion pareille, ça ne se rate pas.

Quand même, c’est l’ours qui sait tout.

La citation du jour

Derrière la dentelle des roseaux, s’envole une amphibie plaidoirie… Flap ! Flap !

Rousseau in Les rêveries du dindon solitaire

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