Catégorie : Chronique du temps passé

  • L’ours qui sait tout

    Les problèmes s’accumulent sur la montagne.

    Les Edelweiss poussent de travers et les chèvres chantent la Traviatta. Les caprices de la météo, par un jour exécrable, balaient les arbres à l’aide d’une tempête mémorable. La tragédie est aux portes de la cité, inévitable, alors les boutiquiers envisagent la commande de robes de bure et de sacs de cendres.

    De leur côté, les écrivains échafaudent des oraisons funèbres et les plus courageux feuillettent les journaux à la recherche d’emplois, ailleurs, dans le monde.

    De ce sombre panorama, il ne manque qu’un joueur de flûte et des enfants naïfs.

    Pour remonter le moral de la population, sur une intuition, un quidam propose l’organisation de la fête de la tulipe.

    Applaudissements, soulagements… Soudain, désespoir.

    Personne de connu ou de reconnu ne sait planter et entretenir ces fleurs, et, d’après les gens instruits, il serait inconvenant de nommer un inconnu que personne ne connaît.

    Heureusement, quelqu’un connaît quelqu’un qui connaissait quelqu’un, qui lui-même connaissait quelqu’un qui connaissait un ours.

    Ça tombe bien, cet ours est un expert.

    Tour à tour, jongleur de foire, animal des prétoires, portant l’habit magistral et noir, il sait lire dans le marc à café, cultiver les petits pois, danser sur la musique des corneilles, accumuler des noisettes pour les écureuils, vendre des icebergs à la marine anglaise et commander militairement les autres, comme Napoléon à Austerlitz.

    Quelle chance ! Ni une ni deux, on le fait venir, une occasion pareille, ça ne se rate pas.

    Quand même, c’est l’ours qui sait tout.

    La citation du jour

    Derrière la dentelle des roseaux, s’envole une amphibie plaidoirie… Flap ! Flap !

    Rousseau in Les rêveries du dindon solitaire

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  • CCS et les valses de Vienne

    Conrad est un hippopotame de petite taille, maigre et sympathique, malgré ces deux virgules cinq tonnes.

    Christèle, sa compagne, est une fluette de mille huit cents kilos.

    Serge, leur ami proche n’a jamais dévoilé son poids.

    Il est, paraît-il, très timide, mais à l’évidence, prend plus de place que Conrad.

    Ce soir, il a invité le couple de ses amis pour un bal à la viennoise dans un magasin de porcelaine.

    Un commerce réputé pour le soin de son travail et la modestie de ses créateurs.

    Le lieu brille de la lumière d’un lustre, la musique se déroule, agréable.

    Tous les trois affectionnent les valses et se laissent emporter par leurs élans.

    Girouettes, entrechats, portées, pirouette et triple « lutz».

    Fracas, étagères qui tombent, panique et fuite des employés, étayage du plancher depuis l’étage inférieur, intervention d’un ingénieur pour assurer la stabilité du bâtiment et l’exécution d’un plan de crise au cas où.

    Le bal des hippopotames dans le magasin de porcelaine bat son plein.

    À une heure du matin, fatigués et couverts de sueur, C, C et S, traversent les débris, se félicitent d’une soirée si réussie et rentrent chez eux.

    Devant le commerce et le désastre, sur un panneau rédigé d’une main tremblante est écrit :

    Fermeture pour cause de faillite.

    Depuis cette nuit tragique, on ne trouve plus du tout de porcelaine dans cette ville.

    La citation du jour

    Les aveugles s’entendent bien pour ne rien voir, les sourds n’entendent rien et c’est tout.

    Montesquieu – in L’esprit des apocryphes 

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  • CCS et les suricates

    Dans le bassin du zoo, le plus gros des Hippopotamus amphibius, du haut de ses trois tonnes,  se sent à l’étroit.

    Il en fait part à sa douce, Sophie, la plus jolie de toutes, des petites oreilles qui frétillent comme des poissons, et des yeux malins.

    Quel charme !

    Après réflexion, la beauté, s’adressant à Claude Charles Sébastien, « CCS », pour les intimes, surnom affectueux qu’elle lui susurre tous les matins en se brossant les dents, elle dit, comme ça, en passant : 

    – Le territoire des suricates n’a pas de barrière, leurs gamelles débordent de céréales, il est agréablement situé sur un versant traversé par le vent des montagnes, les habitants sont frustes et naïfs… Des orgueilleux… Que dirais-tu de croquer dans la galette ?

    CCS pense que toutes les céréales de ces mangoustes, ça fera maigre pour un hippopotame comme lui.

    Bah, les fibres, c’est bon pour la santé s’empresse-t-elle d’ajouter, et l’avantage des gros, c’est que les petits s’écartent…

    La citation du jour

    « Un hippopotame dans un magasin de porcelaine ne vient pas faire la vaisselle. »

    Cassandre, in Les narrations apocryphes

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  • CCS on the rock

    Le Capitaine Edward Smith, affectueusement surnommé par l’équipage du Titanic : Le « Captain Cool Smith » au vu de sa bonhomie légendaire, soit CCS pour les intimes, se réjouit de l’événement particulier que représente la glorieuse traversée de l’Océan Atlantique.

    Départ en fanfare et presse unanime.

    Sur son passage et sans états d’âme, il écrase quelques pingouins rachitiques et peu véloces.

    Puis il tombe sur glaçon… Pour le plus grand bonheur de l’industrie cinématographique.

    La citation du jour

    « Il est difficile de ne pas savoir ce qu’on sait déjà »

    Saint Thomas

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