La fille du diable

Plus gore tu meurs !

Disons-le d’entrée, le style gore – films, romans – ne m’amuse pas. Je suis sans doute de cette génération soixante-huitarde dont les illusions ont été si bien massacrées par le système, que je ne parviens pas à rire de la drôlerie des viscères et de l’hémoglobine étalées à longueur de pages. Oui, mais… comme toute règle a son exception, je tombe parfois sur une perle noire. Ainsi, le deuxième roman de la valaisanne Christelle Magarotto, journaliste, peintre et auteure, « La Fille du diable » auto-publié. Fallait oser, en pays catho, balancer aux lecteurs un diable foutrement sexy, attirant, géniteur d’une future diablesse qui risque bien de changer la face du monde, abattant enfin le patriarcat : une brave nenette d’une région montagnarde, mal mariée, croise, lors d’une balade, des créatures de son sexe, vêtues de toges blanches, qui lui présentent un Apollon décalé, yeux verts et slip kangourou. Parler de coup de foudre serait une injure à Satan et à la gentille vierge – son gros pantin de mari n’ayant jamais trouvé le bon trou pour se décharger. Orgie, passion et retour à la maison, encore ébaubie par son incroyable aventure, la mère du futur diable retrouve son quotidien. Mais il a du plomb dans l’aile de la réalité qui dérape vite et bien, c’est qu’elle est en cloque du démon, d’où les excès alimentaires assez peu ragoutants, dont elle s’accommode, aidée par un chat noir. Grossesse en mode turbo, maison luxueuse érigée par l’ange blond de l’apocalypse, l’héroïne va bientôt accoucher d’une fleur vénéneuse qui réécrira à sa manière le mythe d’Adam et Eve. Jouissif, dans tous les sens du terme ! 

Christelle Magarotto manie le verbe avec une adresse redoutable, appliquant aux personnages un niveau de langage qui les définit. Elle crée une Marie, mère de la diablesse, qui accepte avec philosophie ce destin dont toute femme pourrait presque rêver ! Cerise sur ce gâteau d’enfer : la couverture du livre a été créée par l’auteure herself, sobre, efficace, esthétique.

Surprenant que Magarotto n’ait pas publié ce manifeste rigolard aux Editions du « Gore des Alpes » où il occuperait une place de choix.

Christelle Magarotto – commande auprès de : www.librairiesolitaire.ch

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